ll y a 30 ans disparaissait le grand poète René Char. Afin de rendre hommage au grand poète qu’il fut, voici un article que je lui ai consacré. (photos prises, cet hiver, à Fontaine de Vaucluse, et au Partage des Eaux).
René Char est né à l’Isle-sur-la-Sorgue, en 1907, où tournent, inlassables, de grandes roues moussues, sur les multiples bras de la Sorgue, qui traverse la ville.
Qui d'autre était mieux placé que ce poète, pour évoquer notre Provence éternelle, avec tendresse, amour, fraternité et mystère ! Une partie de son œuvre est habitée par ce pays de Provence, et y prend sa source.
La Sorgue est celle qui traversera la vie et l’œuvre de René Char. Celle qui donne son nom à l’un des poèmes les plus marquants du XXe siècle, s’ouvrant sur ces vers célèbres :
« Rivière trop tôt partie, d’une traite, sans compagnon / Donne aux enfants de mon pays le visage de ta passion / Rivière où l’éclair finit et où commence ma maison, / Qui roule aux marches de l’oubli la rocaille de ma raison »... « J’avais dix ans, la Sorgue m’enchâssait », écrira-t-il.
La Sorgue est devenue un synonyme de « rivière » à force de se démultiplier, en une série de cours, dont les eaux rejoignent, tôt ou tard, après plus ou moins de détours, le vaste Rhône.
Il faut guetter, de pont en pont, les accélérations de la Sorgue, goûter la fraîcheur égale de son eau, treize degrés à peine, tout au long de l’année, y lire ou y relire les écrits de René Char.
C’est donc en rêveur, plutôt qu’en biographe, qu’il faut suivre le cours de la Sorgue, se laisser emporter par son chant et plonger dans l’œuvre vivifiante de René Char, en s’ouvrant à cette part de poésie que l’on porte tous en nous.
Le « Partage des Eaux », appartient à la géographie intime de l’écrivain. Un lieu-dit en retrait de l'Isle sur la Sorgue, où l’on assiste à la séparation : une partie des eaux poursuit sa route vers L’Isle-sur-la-Sorgue, puis Entraigues ; l’autre se laisse glisser vers la gauche, en direction du Velleron.
Attablé à une guinguette, on caresse l’idée de se laisser filer, sur l’eau, à bord d’un « nego chin », petite embarcation typique à fond plat, que l’on manie au moyen d’une longue perche. On s'imagine, aussi, aidé par la présence d’un pêcheur sur la berge, tout un monde secret se mouvant sous la surface.
En arrière plan, une guinguette.
Nous reviennent aussi les propos de René Char racontant, comment, enfant, torse à l’air, le bord de ses culottes de courtil relevé, il fouillait l’eau trop froide, pour en sortir d’entre les herbes, à mains nues, un mulet cabot au ventre palpitant.
Le « spectacle pour une toile des pêcheurs » nous ramène à la source, dans l’un des recueils de René Char : un « retour en amont ».
Nous voici donc tout au bout de la vallée, à Fontaine-de-Vaucluse, là où la Sorgue prend son élan et emprunte à l’herbe, son irréelle teinte émeraude.
Les mystères de la source : Nous cheminons entre les flancs de la colline, pour nous pencher au-dessus du gouffre.
Passé l’impétuosité et le bouillonnement du printemps, le flux de la Sorgue est, à dire vrai, inversement proportionnel à celui des touristes.
Mais la rivière naissante n’en conserve pas moins sa part de mystère.
Car aujourd’hui encore, on ne saurait dire avec certitude d’où viennent ces eaux qui, au terme d’une longue traversée au creux de la roche, « surgissent » ici au grand jour, (Sorgue, proviendrait de « surgere », qui signifie « surgir » en latin).
On ne sait pas, on ne saura peut-être jamais quels souterrains empruntent ces eaux, quels souterrains empruntent les mots.
D’où l’hommage du poète à la source, symbole du désir, de la pureté et d’une inspiration sans cesse renouvelée.
Une partie de l’enfance de René Char, et de son adolescence, se déroulent à l’Isle-sur-la-Sorgue. Parti pour Paris, il adhère, en 1929, au mouvement surréaliste. Il publie notamment une série de poèmes écrits en collaboration avec Paul Éluard et André Breton.
Pendant la guerre, l’écrivain s’engage dans la Résistance sous le nom de Capitaine Alexandre. Un chapitre de sa vie qui va nourrir, entre souffrance et espérance, son recueil : les Feuillets d’Hypnos, parus en 1946.
Proche de Camus, René Char a poursuivi jusqu’à sa mort en 1988 une œuvre abondante, l’une des plus riches de la poésie française. Son ami Albert Camus a écrit de lui : « Je tiens René Char pour notre plus grand poète vivant […].
Foudroyé par une crise cardiaque, René Char s'éteint à Paris le 19 février 1988 ; il avait 81 ans. L’immense poète repose dans la sépulture familiale du petit cimetière de l’Isle-sur-la-Sorgue, (Vaucluse). L’hôtel Campredon ou « maison René Char » à l'Isle sur la Sorgue, propose au public une collection de manuscrits, dessins, peintures et objets d’art ayant appartenu à René Char.
Pour lui, en son hommage et avec respect, un lierre en fleurs. Parmi les herbes aromatiques, on peut lire cette inscription, extraite de son Poème pulvérisé : “Si nous habitons un éclair, il est le cœur de l’éternel”.
Mes citatations préférées, de René Char :
René Émile Char est le benjamin des quatre enfants issus des secondes noces, en 1888, d'Émile Char, négociant né en 1863 à L'Isle-sur-la-Sorgue, et de Marie-Thérèse Rouget, sœur de sa première épouse, Julia Rouget, morte en 1886 de tuberculose un an après leur mariage.
https://fr.wikipedia.org
J'ai beaucoup aimé découvrir ce bel article. Des photos magnifiques et un bel hommage à cet homme remarquable.
Nous y étions avec ma soeur la semaine dernière à Fontaine de Vaucluse. Il y faisait si froid que nous n'étions pas embêtées par le monde. Malheureusement impossibilité d'aller jusqu'à la grotte. Tout est fermé jusqu'à la fin Avril.
Je te souhaite une belle fin de semaine Pascale. un gros bisou